Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Uranus en parachute

Episode

Uranus et moi nous baignons nus
comme à l'accoutumée
depuis les berges de la Loire,
nous sommes tout proche de son repaire de Montsoreau
et nous évoquons les souvenirs communs.
L'eau de la Loire
fouette les sangs
même en ce début d'été
et je suis heureux de vivre
de l'amour de ma chevale.
Les beaux et grands yeux noirs
d'Uranus me dévisagent à l'entour,
sa vision est très étendue et,
elle comme moi sommes ainsi,
aujourd'hui
à l'écoute de nous-mêmes.
Aussi cette perception
me bouleversa
lors de cette belle soirée d'été
au sillon de Talbert
où je découvrais
depuis son extrémité
(soit deux ou trois kilomètres en mer)
que je pouvais renifler un
minuscule feu domestique
à cette distance de la côte
et mieux encore, l'apercevoir.
Je décidais alors
de me mettre en quête de la
première chevale
qui m'ait jamais parlé
et que j'avais rencontré
quelques années plus tôt
lorsque je servais comme tambour.

 -o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Uranus prend la parole
u - C'est ici ma retraite
depuis que j'ai tiré
ma révérence voilà bien dix années.
Ici, à Montsoreau je ne suis plus réveillée
par les trains durant la nuit,
ni par le pupitre des percussions aux aurores.

- Et quelle révérence !
quelle sortie ! je me rappelle,
c'était pendant le carrousel
en 1996 n'est ce pas ?

u - Oui.

- Les palefreniers dont j'étais
dormions dans l'ancien mess
les matins de carrousel.
Nous y avions repéré un vieux canapé,
on y dormait à cinq,
l'un sur le dos de l'autre
avant notre ordinaire.

u - Votre pupitre n'était bon qu'à ça et c'est alors
que je me suis rendue au port-aviation.

- Il y avait tout de même dans ce pupitre
un timbalier qui montait.

u - Moi ?
montée des nacaires ?
mais vous plaisantez,
j'avais un autre rang mon pauvre ami,
j'étais la chevale du colonel
je vous rappelle... Et fière.

- Je voulais juste vous faire remarquer
que l'unique type de percussionniste
qui monte à cheval est le timbalier.

u - Quel casse-burette celui-là.

- A quelle heure avez-vous sauté ?

u - J'ai sauté au moment où
la cavalerie motorisée de motocyclettes
commençait ses clowneries
au beau milieu de l'enceinte du carrousel,
c'était là ma cible d'atterrisage.

- Lorsque votre parachute a été visible
la rumeur a commencé à s'élever dans le public
par dessus le bruit des moteurs,
et plus encore, lorsque
sous ce parachute nous distinguâmes une
chevale.

u - J'avais tellement répété ce moment
et j'arrivais précisement
à la fin de la prestation des motards.

- Le colonel - que j'observais -
vous a reconnu tout comme moi,
il a été pris de panique. Il gueulait
comme un veau des instructions délirantes, à propos de
défense aérienne, de terroristes, de D.C.A...

u - Ah oui ?

- Lente était votre chute, et gracieuse.
Les gens poussaient des "oh" d'admiration,
les enfants sautaient de joie :
"une chevale ! une chevale dans le ciel !"
"une chevale ! une chevale dans le ciel !"

u - pourtant lorsque je suis arrivée je me souviens d'un silence solennel.

- Nous retenions notre souffle,
dans la dernière courbe que vous décriviez
et qui vous déposait sur le tapis rouge
au pied du stand du colonel,
nous attendîmes d'entendre votre message.

u - J'avais un complice pour m'ôter le parachute.

- Personne n'a osé l'en empêcher :
vous, sûre de votre effet
et nous
tous qui étions stupéfaits...

u - Ca n'était plus qu'une démission réglementaire.

- Oh oui, mais quelle classe !
ce sabre au clair d'abord
que vous avez ensuite jeté à terre.

u - Larme à l'oeil !
J'aurais voulu le casser sur mon genou.

- Vous avez alors crié
"Par Saint-Georges,
ne vive plus
la cavalerie"

u - "Par Saint-Georges,
ne vive plus
la cavalerie" !

- Et vous êtes partie lentement,
crinière défaite,
croupe extraordinaire...

u - Damassée par vos soins, cher,
et du matin.

- Voilà bien ce que je savais faire,
damasser des croupes
avec la grosse brosse à crin.

u - Comment ça, des croupes ?

- Hein... (Je rêve éveillé, Uranus hennit).

u - Comment ça, des croupes ? Paul ?

- Eh bien après votre départ on m'a confié un autre cheval.

u - Un ou une ?

- Une autre chevale, pour être exact.

u - Et comment était-elle ?

- C'était votre remplaçante.

u - Une remplaçante pour le colon, c'est ça, hein ?

- Euh, oui.

u - Ah le goujat. une jeune je parie ?

- Euh...

u - Bon écoutez moi bien Paul, je peux comprendre les aventures et même toutes les aventures surtout
avec des pouliches...

- Ah bon ?

u - Je lis dans vos yeux qu'elle a finit dans l'assiette du colonel.

- Comment faites-vous ?

u - L'intuition féminine, mon ami.

- Vieille carne alors.

u - Rien que de la semelle. Allez, passez-moi donc la brosse que je me délasse.

Commentaires

  • Comment la chevale rit...

Les commentaires sont fermés.